MONTS 14 : Que devient la ZAC Montsouris ?

MONTS 14

Association de Sauvegarde
du Patrimoine
du 14 ème arrondissement

63 rue Daguerre - F 75014 Paris
Tél : 01 43 20 11 62
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Email: paris14eme@chez.com


QUE DEVIENT LA ZAC MONTSOURIS ?

Le 17 mars 1994, un protocole d'accord est signé entre la Ville de paris, la RATP, l'Etat et le Syndicat des Transports Parisiens afin de valoriser l'emprise sous-utilisée des terrains de la RATP situés de part et d'autre de l'ancienne ligne de Sceaux entre les avenues Reille, René Coty et la rue d'Alésia.


UNE OFFRE DE CONCERTATION...

En rupture avec les ZAC (zones d'aménagement concerté) barbares des années 70, la Ville de Paris prône la concertation et ne cessera de la traduire en actes. Tout d'abord, deux grandes réunions publiques, auxquelles tous les riverains sont conviés, ont lieu à la mairie du 14ème les 23 juin et 26 octobre 1994.

Le maire du 14ème multiplie ensuite les rencontres avec les associations.

La SADM (Société d'Aménagement Denfert-Rochereau : société d'économie mixte chargée de la réalisation du projet) prend le relais en février 1996 en mettant en place une procédure de concertation systématique pour chaque étape du projet.


... A LAQUELLE LES HABITANTS NE SONT PAS PREPARES

Mais que peut-il résulter d'une réunion publique où se pressent plusieurs centaines d'habitants mal informés auxquels est annoncé un vaste programme immobilier qui va peut-être doubler la population de leur petit quartier ?

Lors des premiers contacts de juin à octobre 1994, les procès d'intention de toute nature fusent, qu'il s'agisse de la taille des immeubles, du manque d'infrastructures (équipements scolaires et sportifs, transports en commun), de la circulation automobile, de la nuisance sonore liée au voisinage immédiat des rails du RER, des espaces verts...

En dehors du fait que la densification, qualifiée de "forteresse de béton", paraît excessive et que le quartier n'est pas prêt à la recevoir, la population ne formule guère de souhaits concernant la physionomie du projet par rapport au paysage environnant, si ce n'est que le talus soit conservé et qu'il y ait une perspective verte en face du parc Montsouris. Le maire du 14ème interprète ces réactions en décidant de garder 9 000 m2 d'espaces verts, d'aménager un petit square, des terrains de jeux, de lancer une nouvelle ligne de bus (n°88)... et de construire un gymnase ! Les grandes lignes du plan d'aménagement se précisent en fin de compte sur des thèmes écologiques généraux et non sur la particularité du site de Montsouris.

Les réunions de travail à la mairie qui ont lieu par la suite laissent une mauvaise impression à certaines associations. En infériorité numérique face à un collège de représentants des services techniques de la ville de Paris faisant bloc autour d'un plan d'aménagement, celles-ci ont la sensation de se heurter à un mur, d'avoir affaire à un projet "déjà ficelé" plutôt que de participer réellement aux choix majeurs.


L'ENQUETE PUBLIQUE

L'enquête publique est lancée du 13 février au 9 avril 1995. En prévision, l'ADEPAM d'une part et un groupement de 8 associations d'autre part : ADERASA, AUT, ADOM, ADQODR, ADRA, FCPE, PEEP, SOS PARIS organisent deux réunions publiques différentes qui rassemblent plusieurs centaines de personnes chacunes. L'hostilité au projet reste inchangée.

Apparaissent en outre dans l'assistance quelques réactions hostiles aux logements sociaux qui vont bouleverser la composition démographique du quartier.

Quelques idées sont enfin émises concernant le plan d'aménagement et l'architecture : des constructions dans l'alignement de l'avenue René Coty sont préférées aux "dents de peigne"; une construction remarquable est souhaitée à l'angle de la rue d'Alésia et de l'avenue René Coty, des volumes peu agressifs face au parc Montsouris et un jeu de gradins et placettes face à l'avenue Reille...

Le commissaire enquêteur livre son rapport le 8 août 1995.

Le 6 novembre qui suit, le maire du 14ème fait voter au conseil d'arrondissement un nouveau plan de ZAC avec une surface de logements réduite de 20% au détriment essentiellement des PLA; le nombre d'habitants attendus est de 2500 et non 4000 comme certains l'avaient craint. La surface des espaces verts est portée à 10470 m2.

En début 1996, plus rien ne s'oppose à la réalisation de la ZAC. Les associations ont le choix entre faire confiance à la concertation ou déposer un recours.


DES ASSOCIATIONS OPTENT POUR UNE CONCERTATION DEPOURVUE DE MOYENS DE PRESSION...

Certaines associations, à savoir l'ADEPAM, l'ADERASA, l'ADQM, l'ADRA, la Plateforme estiment alors ne plus avoir de moyens de pression. Plutôt que le projet se fasse sans elles, elles acceptent la proposition de concertation de la SADM, tout en sachant qu'elles n'auront qu'une influence marginale sur le projet.

Elles assistent à un travail de mise en forme très fastidieux. Malgré leur vigilance passent des projets dont l'architecture laisse à désirer.


... ALORS QUE D'AUTRES LUTTENT POUR LES AQUEDUCS

Fin 1995, l'association Oxygène se souvient de l'existence de l'aqueduc de Catherine de Médicis et du gallo-romain, complètement tombés aux oubliettes.

Personne à l'époque n'accorde vraiment d'importance à ces vestiges, mais c'est le seul argument existant sur un plan juridique. SOS PARIS, Oxygène et l'ADERASA s'y accrochent et parviennent à un beau succès en obtenant la préservation et la mise en valeur d'une large portion de ceux-ci.

Ces actions ne bloqueront jamais le chantier qui sera seulement retardé de 6 mois. Ces trois associations n'ont donc pas obtenu que l'ensemble du projet soit remis à plat pour repartir "sur des bases plus saines". Ultime tentative en ce sens, l'association AME dépose des recours à tour de bras depuis un an. La SADM l'accuse d'avoir retardé la conclusion de marchés avec les promoteurs et lui réclame actuellement 3,5 millions de francs de dommages et intérêts.


LES ERREURS DE LA CONCERTATION

La concertation a été certes respectée dans la forme mais elle a raté son but. les critiques exprimées par les habitants en 1994 traduisaient le désir de faire échouer (ou réduire fortement) un projet que tout le monde s'attendait à être détestable. Les préjugés en la matière avaient quelques fondements, compte tenu de l'expérience passée des ZAC de la ville de Paris.

Avait-on espoir de voir autre chose que de nouvelles "Places des Fêtes" ou "rues de l'Ouest" ? Les arguments du type "absence d'espaces verts" ou "insuffisance des équipements collectifs" ne devaient donc pas être pris pour argent comptant.

A partir du moment où l'emprise des voies, espaces verts et équipements publics atteignaient 37% de la superficie totale, la physionomie du projet était prédéterminée par la prédominance d'immeuble de 6 à 8 étages ! La solution de type "Le Corbusier" avec des immeubles élevés l'emportait sur celle du type "rue du square Montsouris". Il en aurait peut-être été différemment si d'emblée des choix de ville alternatifs avaient été proposés par les élus sur le modèle des quartiers de charme avoisinants. L'épine des rails du RER devait être traitée en fonction de ces objectifs et non pas l'inverse. Une fois cette option retenue, les associations non sans raison, avaient la sensation de ne pas avoir prise sur la physionomie du projet. De fait, leur regard "naïf" ne pouvait suppléer au manque d'inventivité des architectes d'aujourd'hui.


LE CAHIER DES PRESCRIPTIONS ARCHITECTURALES ET PAYSAGERES

Dans les prémisses du projet, les multiples conseils sont plutôt de nature à rassurer. Il est demandé aux architectes de s'inspirer du relief environnant, du parc Montsouris et des autres espaces boisés, d'aménager les parcelles avec de hauts immeubles sur rue derrière lesquels se trouvent des îlots de maisons basses avec des venelles, des passages, des maisons individuelles, des morceaux de jardin éventuellement privatifs.

Des paysages des rues avoisinantes sont donnés en exemple. Le cahier des charges comprend également de très nombreuses recommandations architecturales. Le séquençage vertical est préféré, avec une seule entrée par unité d'habitation, pour donner au maximum l'illusion d'une succession d'immeubles. Le bas des immeubles doit être marqué par l'idée de socle. Les architectes se doivent de tenir compte des éléments apportés par les prédécesseurs en les déclinant à leur manière (marquage des portes d'entrée, etc.).

Par ailleurs un nombre considérable de prescriptions concernent les espaces verts, la qualité du mobilier urbain, un certain sens du paysage.


LES FORCES ET LES FAIBLESSES DE LA REALISATION FINALE

La ZAC est très densifiée avec un COS global de 2,5 hors voiries, espaces verts, équipements publics. Dans la plupart des lots vendus aux promoteurs, le COS autorisé dépasse en réalité 3. Sur ces parcelles privées, une partie du terrain disponible doit être réservée aux voies et espaces privés, si bien que sur le solde disponible la densification est obligatoirement très forte avec des immeubles de 6-7 étages. L'aspect du projet, dans ce cas, dépend essentiellement de la capacité des architectes à réaliser des oeuvres d'art, ce qui est rien moins qu'évident...

En guise de réponse à cette inquiétude, le terrain est subdivisé en une quinzaine de lots confiés à des promoteurs publics ou privés qui doivent choisir leurs architectes parmi les 25 architectes retenus lors d'un concours.

Certains ont une grande notoriété comme de Portzamparc.

L'idée est qu'en laissant chacun s'exprimer selon sa sensibilité, on risque de retrouver la diversité qui fait le charme des rues parisiennes, avec le cahier des prescriptions architecturales et paysagères pour garde-fou.

Encore faut-il que les architectes en tiennent compte ! Certains ont effectivement intégré avec plus ou moins de bonheur ces recommandations.

D'autres ont estimé qu'ils pouvaient passer outre, en raison de leur notoriété. La sensation du cube de béton lisse et plat est perceptible à de nombreux endroits. Si bien que la ZAC va s'achever en laissant une sensation globalement décevante.

Toute la difficulté réside dans l'art même de l'architecture d'aujourd'hui; quand sera-t-on capable de retrouver pour l'homme des dimensions riches pour son épanouissement personnel ?


L'ASSOCIATION MONTS 14 INTERVIENT TARDIVEMENT

L'association a été fondée en mars 1996, alors que la physionomie générale du projet était déjà arrêtée.

Tardivement, constatant que certains projets d'architectes sont décevants, elle tente aujourd'hui de les faire corriger, comme celui de la COGEDIM en face du parc Montsouris. Mais de telles interventions ne peuvent avoir qu'une portée très limitée.


Patrice Maire retour à la page précédente 10/02/99